Objet d’étude : Argumenter, l’apologue.
Liste des documents :
Doc.1 : La dent d’or Histoire des oracles Fontenelle 1687
Doc.2 : Lettre de Diderot à Sophie Volland 26 septembre 1762
Doc.3 : Article Philosophe Encyclopédie Dumarsais 1751-1762
Doc.4 : Le Ministère de La Vérité 1984 George Orwell 1949
Questions sur les documents : 4 Points
1- Caractérisez le genre de chacun des quatre textes du corpus qui ont pour thème commun la vérité.
2- Quels reproches Fontenelle adresse-t-il implicitement aux savants d’Allemagne ?
3- Quel est le point commun entre la démarche du philosophe de Dumarsais et celle du savant de Fontenelle ? Trouvez dans chaque texte une figure de style qui met particulièrement en valeur cette démarche idéale.
Travail d’Écriture au choix 16 points
Remettre la feuille d’évaluation avec votre devoir.
Écriture d’invention
A votre tour, vous rédigerez un apologue - dont la thèse sera explicite- sur le thème de la vérité dans notre société actuelle.
Ce récit comportera un minimum de deux pages.
Commentaire littéraire
Vous ferez le commentaire littéraire du texte de Fontenelle.(Doc.1)
Conservez vos brouillons ou vos recherches de plan.
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Doc.1 : La dent d’or Histoire des oracles 1687 (Extrait)
Il serait difficile de rendre raison des histoires et des oracles que nous avons rapportés, sans avoir recours aux Démons, mais aussi tout cela est-il bien vrai ? Assurons nous bien du fait, avant de nous inquiéter de la cause. Il est vrai que cette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par-dessus la vérité du fait ; mais enfin nous éviterons le ridicule d'avoir trouvé la cause de ce qui n'est point.
Ce malheur arriva si plaisamment sur la fin du siècle passé à quelques savants d'Allemagne, que je ne puis m'empêcher d'en parler ici.
En 1593, le bruit courut que les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venu une d'or, à la place d'une de ses grosses dents. Horatius, professeur en médecine à l'université de Helmstad, écrivit, en 1595, l'histoire de cette dent, et prétendit qu'elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu'elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens, et aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d'or ne manquât pas d'historiens, Rullandus en écrit encore l'histoire. Deux ans après, Ingolsteterus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d'or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme, nommé Libavius, ramasse tout ce qui avait été dit sur la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu'il fût vrai que la dent était d'or. Quand un orfèvre l'eût examinée, il se trouva que c'était une feuille d'or appliquée à la dent avec beaucoup d'adresse ; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l'orfèvre.
Rien n'est plus naturel que d'en faire autant sur toutes sortes de matières. Je ne suis pas si convaincu de notre ignorance par les choses qui sont, et dont la raison nous est inconnue, que par celles qui ne sont point, et dont nous trouvons la raison. Cela veut dire que non seulement nous n'avons pas les principes qui mènent au vrai, mais que nous en avons d'autres qui s'accommodent très bien avec le faux.
Fontenelle (1657-1757) Extrait du chapitre 4 (Anthologie page 209)
Doc.2 : Lettre de Diderot à Sophie Volland 26 septembre 1762
(Extrait)
Ce qui caractérise le philosophe et le distingue du vulgaire, c’est qu’il n’admet rien sans preuve, qu’il n’acquiesce point à des notions trompeuses et qu’il pose exactement les limites du certain, du probable et du douteux.
Cet ouvrage1 produira sûrement avec le temps une révolution dans les esprits, et j’espère que les tyrans, les oppresseurs, les fanatiques et les intolérants n’y gagneront pas.
Nous aurons servi l’humanité.
1- Il s’agit de l’encyclopédie
Diderot (1713-1784)
Doc.3 : Article Philosophe Encyclopédie 1751-1762(Extrait)
Le philosophe forme ses principes sur une infinité d'observations particulières. Le peuple adopte le principe sans penser aux observations qui l'ont produit : il croit que la maxime existe, pour ainsi dire, par elle-même ; mais le philosophe prend la maxime dès sa source ; il en examine l'origine ; il en connaît la propre valeur, et n'en fait que l'usage qui lui convient.
De cette connaissance que les principes ne naissent que des observations particulières, le philosophe en conçoit de l'estime pour la science des faits ; il aime à s'instruire des détails et de tout ce qui ne se devine point ; ainsi, il regarde comme une maxime très opposée au progrès des lumières de l'esprit que de se borner à la seule méditation et de croire que l'homme ne tire la vérité que de son propre fonds... La vérité n'est pas pour le philosophe une maîtresse qui corrompe son imagination, et qu'il croie trouver partout ; il se contente de la pouvoir démêler où il peut l'apercevoir. Il ne la confond point avec la vraisemblance ; il prend pour vrai ce qui est vrai, pour faux ce qui est faux, pour douteux ce qui est douteux, et pour vraisemblable ce qui n'est que vraisemblable. Il fait plus, et c'est ici une grande perfection du philosophe, c'est que lorsqu'il n'a point de motif pour juger, il sait demeurer indéterminé ...
Dumarsais (1676-1756)
César Chesneau Dumarsais : ami de Diderot et de d’Alembert, maîtres d’œuvres de l’Encyclopédie, il est chargé par eux de rédiger pour cet ouvrage l’article « Philosophe » qui reflète l’idéal du mouvement dit des « Lumières ».
(Anthologie p 266)
Doc.4 : Le Ministère de La Vérité 1984 1949
Winston restait le dos tourné au télécran. Bien qu'un dos, il le savait, pût être révélateur, c'était plus prudent. A un kilomètre, le ministère de la Vérité, où il travaillait, s'élevait vaste et blanc au-dessus du paysage sinistre. Voilà Londres, pensa-t-il avec une sorte de vague dégoût, Londres, capitale de la première région aérienne, la troisième, par le chiffre de sa population, des provinces de l'Océania. [… …]
Le ministère de la Vérité - Miniver, en nov-langue - frappait par sa différence avec les objets environnants. C'était une gigantesque construction pyramidale de béton d'un blanc éclatant. Elle étageait ses terrasses jusqu'à trois cents mètres de hauteur. De son poste d'observation, Winston pouvait encore déchiffrer sur la façade l'inscription artistique des trois slogans du Parti :
La guerre c'est la paix
La liberté c'est l'esclavage
L'ignorance c'est la force.
Le ministère de la Vérité comprenait, disait-on, trois mille pièces au-dessus du niveau du sol, et des ramifications souterraines correspondantes. Disséminées dans tout Londres, il n'y avait que trois autres constructions d'apparence et de dimensions analogues. Elles écrasaient si complètement l'architecture environnante que, du toit du bloc de la Victoire, on pouvait voir les voir toutes les quatre simultanément. C'étaient les locaux des quatre ministères entre lesquels se partageait la totalité de l'appareil gouvernemental.
Le ministère de la Vérité, qui s'occupait des divertissements, de l'information, de l'éducation et des beaux-arts. Le ministère de la Paix, qui s'occupait de la guerre. Le ministère de l'amour qui veillait au respect de la loi et de l'ordre. Le ministère de l'Abondance, qui était responsable des affaires économiques. Leurs noms, en nov-langue, étaient : Miniver, Minipax, Miniamour, Miniplein.
Winston fit brusquement demi-tour. Il avait fixé sur ses traits l'expression de tranquille optimisme qu'il était prudent de montrer quand on était en face du télécran.
George Orwell (1903-1950)